Quelques rappels de bon sens....
Au 1er juillet 2013, le nombre de personnes sous écrou comme le nombre de détenus vont atteindre des records, en termes absolus, historiques : 80 700 personnes sous écrou dont 68 569 personnes détenues (France entière). A cette même date, le nombre de détenus en surnombre est de 13 867 ; c’est un record depuis le 1er décembre 2008 (13 957 détenus en surnombre). Au 15 juillet 2013, on compte 973 détenus dorment sur un matelas posé à même le sol (15 juillet 2013
Dans le contexte de la controverse sur la
réforme pénale à mener, entre Manuel Valls,
Ministre de l’Intérieur et
Christiane Taubira, Garde des
Sceaux, Ministre de la justice, je souhaitais revenir sur quelques idées
simples développées dans mon dernier ouvrage « La prison : une
nécessité pour la République » (Buchet-Chastel, 2013) que j’ai eu
l’occasion de défendre devant l’un et l’autre.
Ces idées devraient faire
consensus au sein du Gouvernement et parmi une majorité de nos concitoyens.
3. La
politique pénale a pour objectif de réduire en nombre et en gravité les
infractions pénales. Ce doit être une construction concertée entre la Justice
et l’Intérieur. D’autres départements ministériels sont aussi concernés, les Affaires sociales et
la Santé, l’Education nationale, l’Enseignement supérieur et de la recherche et … les Finances.
4.
Faut-il construire de nouvelles places de
prison (idée de droite ?) ou
réduire le nombre de détenus (idée de gauche ?). Il convient, évidemment
de faire les deux.
5. En ce qui concerne les nouvelles prisons, il convient
assurément ne pas construire n'importe quoi. Un
établissement pénitentiaire de 200 places qui respecteraient les normes du Conseil de l’Europe, ce serait
avant tout un établissement qui comprendrait 200 cellules individuelles,
espaces de repos, d’intimité, de réflexion, de travail intellectuel, de retour
sur soi. Ce serait aussi un établissement disposant des superficies suffisantes
pour organiser les activités des 200 détenus dans la journée et des personnels
pour les encadrer dans la sécurité et le
respect de chacun. Disposant d’ateliers,
de locaux de formation générale ou professionnelle, de lieux d’activités
culturelles ou sportives, d’espaces de promenade, de lieux de soins, lieux de
pratique religieuse, des parloirs, les personnes détenues pourront alors se
préparer à mener à « une vie responsable », pour reprendre l’expression de l’article 1 de
la loi pénitentiaire.
6.
Compte tenu de ces exigences (fort couteuses), il est
certainement nécessaire de réduire le nombre de détenus, mais pas n’importe
comment. « Osons suspendre les incarcérations », nous propose Michel
Fize, délégué national du Mouvement unitaire progressiste (Libération,
8/8/13). C’est évidemment insensé. « Construire de nouvelles prisons serait une
erreur […] Persistons, sans craindre
l'outrage, mettre en œuvre, lorsque la prison croule de pensionnaires et de
désespoir, une loi d'amnistie »,
nous dit Jean-Marie Delarue, contrôleur général des lieux de privation
de liberté » (Les Echos,
8/8/13). Moins absurde - on l’a fait par le passé -, mais politiquement
irresponsable : le Président de la République s’est engagé à ne pas y avoir recours. Pourquoi alors agiter
ce chiffon rouge ? Histoire de rappeler qu’une partie de la gauche n’a pas
encore renoncé au « gauchisme pénal » ?
7. Aussi est-il nécessaire de….
- refonder la libération conditionnelle en s’inspirant de la
recommandation de 2003 du Conseil de l’Europe,
- d’appliquer la loi pénitentiaire de 2009 votée par l’ancienne
majorité (de droite) en développant les
aménagements de peine sous écrou (semi-liberté, placements à l’extérieur, placements
sous surveillance électronique) à condition d’en renforcer l’encadrement
socio-éducatif grâce au recrutement de conseillers pénitentiaires d’insertion
et de probation et à une meilleure
formation de ces agents en criminologie,
- de réduire la durée des
détentions provisoires, comme on avait commencé à le faire par la loi
Guigou du 15 juin 2000,
-
d’expérimenter une nouvelle peine, la contrainte pénale appliquée de la
communauté (peine sans référence à l’emprisonnement) ayant, à
terme vocation à remplacer les peines de d’emprisonnement avec sursis
simple ou avec mise à l’épreuve (voir infra "appel du 1er juin 2012")
- se donner les instruments quantitatifs et qualitatifs nécessaires pour "évaluer" en toute indépendance, renforcer, pour cela, la formation en criminologie de tous les professionnels de la chaîne pénale et renforcer les moyens financiers et humains de l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP) qui depuis le 1er janvier 2010 ne dépend ni du Ministère de l'Intérieur ni du Ministère de la Justice, mais du Premier Ministre.
- et arrêter de croire et/ou de faire croire que l'on changera la prison par décret ou la justice pénale uniquement par une loi.
Je vous propose d'en débattre en septembre
Samedi 21 septembre 2013, conférence-débat de 10h à 13h, 9, rue Malher Paris 4ème (métro Saint-Paul) .
PVT