par Pierre V. Tournier
Les principales recommandations du jury de la conférence de consensus peuvent être classées en trois catégories :
Le
jury recommande d’abolir …
1.1
- les peines plancher (loi du 10
août 2007), 1.2 - la limitation pour les récidivistes de l’accès aux aménagements de peine,
1.3 - les périodes de sureté automatiques,
1.4 - les interdictions professionnelles automatiques,
1.5 - la rétention de sureté (loi du 25 février 2008) et la surveillance de sureté,
Le
jury recommande de réformer
2.1 - réduction du nombre
d’incriminations passibles de l’emprisonnement (sans plus de précision), 2.2 - écartant tout accroissement du parc pénitentiaire, le jury recommande un évolution qualitative de celui-ci,
2.3 - adoption d’un système de libération conditionnelle (LC) « d’office » pour les peines d’emprisonnement, la LC pouvant rester « discrétionnaire » pour les peines de réclusion criminelle ; il s’agirait don, en fait, d’un système dit « mixte » de LC,
2.4 - permettre l’accès aux dispositifs de droit commun,
2.5 - Evaluer les personnes, de façon « raisonnée » avec de nouveaux outils, mais sans dire lesquels.
Le
jury recommande de créer…
3.1
- la « contraire pénale appliquée dans la communauté » (CPC)
que le jury continue d’appeler « peine de probation » 3.2 - le droit d’expression collective des personnes détenues,
3.3 - une structure, au sein du Ministère de la Justice, regroupant les fonctions de la recherche, de la statistique et de l’expérimentation.
Mon point de vue
1.
- Je suis bien entendu fort satisfait de voir le jury convaincu de la nécessité
de créer la « contraire pénale
appliquée dans la communauté » (CPC), même si je ne comprends pas l’entêtement
des uns et des autres à vouloir appeler cette nouvelle sanction « peine de
probation », compte tenu du risque de confusion dans les esprits avec la
peine actuelle du sursis avec mise à l’épreuve – le sursis probatoire –SME -
qui existe depuis 1958 et qui est aussi une « peine de probation »,
au sens du Conseil de l’Europe.
2.
- Je salue l’importance accordée à la création d’un véritable droit
d’expression collective des personnes détenues.
3. - Dans une lettre adressée, le 3 juillet 2009, à
Michèle Alliot-Marie, Ministre d’Etat, Garde des Sceaux – restée sans réponse –
j’avais proposé la création « auprès du secrétariat général de la
Chancellerie, [d’] une mission de
coordination afin d’améliorer l’articulation
entre la recherche, les études, l’évaluation et la production des
statistiques. Cette structure aurait vocation à devenir l’interlocuteur
identifiable, privilégié et coopératif au sein de la Chancellerie de l’ONDRP.
Je crois comprendre que le jury va dans mon sens et je ne peux que m’en féliciter. Faut-il aller jusqu’à une
fusion des unités ?
4.
- Pour l’essentiel, je partage la position du jury concernant la suppression
des peines plancher, de la limitation pour les récidivistes de l’accès
aux aménagements de peine, des périodes de sureté automatiques, des interdictions professionnelles
automatiques, de la rétention et de la surveillance de sûrété. Mais tous ces
choix devront être largement expliqués à nos concitoyens, peu convaincus du
bien fondé de ces supressions - et
défendus dans le cadre d’un projet de réforme globale et réaliste de la façon
de sanctionner les infractions pénales.
5. - Bien entendu, je partage aussi les
considérations du jury sur « l’accès aux dispositifs de droit
commun » et sur l’évaluation des
personnes, de façon « raisonnée », même si j’ai trouvé le jury bien
timide sur le sujet. J’y reviendrai prochainement.
6.
- Je ne suis pas d’accord avec la position qui consiste à proposer la
réduction du nombre d’incriminations passibles de l’emprisonnement, sans
préciser de quelles infractions il s’agit,
sans préciser s’il agit de légaliser telle ou telle transgression, de
dépénaliser ou de requalifier tel délit
en contravention. C’est ce que
j’appelle une proposition « chiffon rouge » qui fait plaisir aux
libertaires, mais qui ne fait évidemment pas consensus au sein de la gauche
réformiste et encore moins dans la société française.
7.
2ème chiffon rouge : je
ne suis pas d’accord pour écarter « tout accroissement du parc
pénitentiaire ». Le jury va d’ailleurs à l’encontre de la position que
Christiane Taubira a rappelée dans son discours d’ouverture.
8.
- 3ème chiffon rouge : je ne suis pas d’accord pour la mise en
place d’un système de libération conditionnelle d’office. D’ailleurs, le jury admet lui-même qu’une telle
proposition n’est pas très crédible, précisant au point 53. « Pour les longues peines, en particulier les
peines de réclusion criminelle, l’adoption de ce système peut néanmoins
susciter débat. La nature des faits et le reliquat de peine peuvent justifier
le maintien d’un système discrétionnaire ». En fait, le jury péconise,
comme je le fais depuis des années, un
« système mixte ».
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