samedi 1 décembre 2012

SOUFFLER DANS UN VIOLON - SUITE ET FIN


Merci à celle et  ceux qui ont réagi par leurs messages amicaux, à la prose, pour moi, diffamatoire de Franck Johannès, journaliste au Monde.

 J’ai particulièrement apprécié celui-ci, qui m’a été adressé par un éminent mathématicien que j’ai connu dans le cadre de l’association Pénombre au début des année 1990 :

« Je me pose des questions sur ma faiblesse de caractère : je ne suis pas encore faché avec toi ! Suis-je coupable ? »
PVT

___________________________________________________________________

Quelques éléments recueillis par mon conseil …


La diffamation constitue un délit prévu et réprimé d'une manière générale à l'article 23 du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse. Elle peut s'effectuer directement (“par des discours, cris ou menaces proférés dans des lieux ou réunions publics”) ou nécessiter un support de communication (“soit par des écrits, imprimés, dessins, gravures, peintures, emblèmes, images ou tout autre support de l'écrit, de la parole ou de l'image vendus ou distribués, mis en vente ou exposés dans des lieux ou réunions publics, soit par des placards ou des affiches exposés au regard du public soit par tout moyen de communication au public par voie électronique”).

Selon l'article 29 de la loi de 1881, est diffamatoire : “toute allégation ou imputation d'un fait qui porte atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé”.

En cas de diffamation publique, l’auteur peut être condamné à 1 an de prison et/ou 45 000 euros d’amende (peines maximales).

La bonne foi de l’auteur des propos peut être retenue, mais la légitimité du but poursuivi ne suffit jamais pour laver de tout caractère délictueux des propos portant atteinte à l'honneur ou la considération d'une personne. Il est ainsi jugé “que la volonté d'informer le public n'est pas exclusive de l'intention de nuire” (Cass. crim., 5 nov. 1970) et “que s'il est légitime d'informer le public (...), le but ainsi poursuivi ne dispense pas le journaliste des devoirs de prudence, de circonspection, d'objectivité et de sincérité dans l'expression de la pensée” (Cass. crim., 6 juill. 1993). En outre, il est acquis “que l'absence de précaution dans les termes employés et de prudence dans la présentation des faits ne permet pas de retenir la bonne foi” (Cass. 2e civ., 3 juill. 2003). La prudence et la mesure dans l'expression constituent en effet des indices de ce que l'imputation diffamatoire est restée proportionnée à la gravité des propos dénoncés (Cass. crim., 6 juill. 1993 et Cass. crim., 12 juin 1987).

La jurisprudence impose ainsi une obligation de pondération aux journalistes et à tous ceux qui s'expriment publiquement. Elle admet une formulation leste dès lors que “le journaliste n'a été ni imprudent, ni inventif, se contentant de rapporter des faits exacts et poursuivant le but légitime d'information des contribuables sans animosité personnelle” (CA Montpellier, ch. corr., 30 sept. 1999). La jurisprudence n'accepte pas que l'on puisse porter des accusations avec “désinvolture et légèreté” (Cass. crim., 17 déc. 1991). De la même façon, est constitutive de mauvaise foi la généralisation hâtive à partir d'un fait unique : “la mise en cause des établissements plaignants procédait d'une généralisation hâtive et d'une amplification systématique d'informations qui n'avaient pas été vérifiées au plan local, (...) alors que la légitimité du but poursuivi ne dispensait pas le journaliste de ses devoirs de prudence et d'objectivité dans l'expression de la pensée” (Cass. crim., 3 juill. 1996). Il en va a fortiori de même pour “l'amplification et la présentation tendancieuse de faits qui n'avaient été corroborés par aucune déclaration de témoin direct” (Cass. crim., 26 nov. 1991). La jurisprudence y voit “une absence totale de rigueur et de professionnalisme” (TGI Paris, 17e ch., 16 nov. 1998). A fortiori, est exclusif de toute bonne foi le recours à une outrance inutilement blessante (Cass. crim., 2 juin 1980). Peu importe la taille de l'article, lorsque l'imputation diffamatoire est reprochée à un journaliste : “ la brièveté d'un article de presse n'autorise pas le journaliste à s'affranchir de son devoir de vérifier, par une enquête préalable, l'information qu'il publie pas plus qu'elle ne le dispense de faire preuve de prudence dans l'expression de la pensée” (Cass. crim., 16 mars 2004).

Le sérieux de l'enquête suppose un recoupement et une vérification des sources de l'information. C'est la condition de sa "fiabilité" (Cass. 1re civ., 3 avr. 2007). Au minimum, les personnes auxquelles le fait diffamatoire est imputé doivent avoir été interrogées et leur "défense" exposée par l'auteur du reproche (V. CEDH, 5 févr. 2009, Brunet-Lecomte et a. c/ France – Cass. crim., 14 nov. 2006). Pour la Cour de cassation, “le devoir d'objectivité du journaliste lui impose de vérifier préalablement l'exactitude des faits qu'il publie (Cass. crim., 26 nov. 1991). Le journaliste ne peut donc se montrer crédule. Il doit procéder au recoupement de l'information qu'il trouve ou qu'il reçoit quelle qu'en soit la source.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire