lundi 21 janvier 2013

POUR UNE POLITIQUE DU CHIFFRE JUSTE...



 Lu sur le blog de Mme Christiane Taubira, Garde des Sceaux (5 janvier 2013).

“A propos  de la surpopulation carcérale.  Il y a plusieurs façons de triturer la réalité au service d’une démonstration ; la plus usagée consiste à donner le vertige par une accumulation de chiffres, statiques de préférence, qui vous assomment et font capituler le raisonnement.  Préférons les chiffres dynamiques, ceux qui disent non seulement comment sont mais comment vont les choses. La population carcérale n’a cessé de progresser. Elle est passée de 61 000 en 2001 à 90 000 en 2007. Elle est actuellement de plus de 67 000. La durée moyenne d’incarcération est passée de 8 à 10 mois en 10 ans. Le taux de surpopulation de 100 % en centres pénitentiaires, atteint 120 à 200 % et jusqu’à 328 % en maisons d’arrêt. Pourtant 10 000 places supplémentaires de prison ont été construites dans le même temps. 45 % des détenus exécutent une peine de moins de six mois. 42 % des sanctions prononcées en correctionnelle portent sur des délits routiers […].

Remarques de Pierre V. Tournier

Tableau de bord de la Chancellerie

A. - Population sous écrou, population détenue

Chr. T. “La population carcérale n’a cessé de progresser. Elle est passée de 61 000 en 2001 à 90 000 en 2007. Elle est actuellement de plus de 67 000”.

Remarque 1. La population sous écrou s’élevait à 47 837  au 1er  janvier 2001, 60 403 au 1er janvier 2007,  73 780 au 1er janvier 2012. Nous ne connaissons pas l’effectif au 1er janvier 2013. 

La population détenue s’élevait à  47 550 au 1er  janvier 2001, 58 402 au 1er janvier 2007,  64 787 au 1er janvier 2012. Elle est de 66 572 au 1er janvier 2013.  Le chiffre au 1er janvier 2001 (47 550) est une estimation ; il y avait à cette date 12 condamnés placés sous surveillance électronique, mais nous ne connaissons pas le nombre de condamnés en placement extérieur sans hébergement pénitentiaire. Aussi avons-nous pris le chiffre le plus ancien à notre disposition :  275 au 1er décembre 2004.

Source : Ces données sont issues de la statistique mensuelle de la population sous écrou, direction de l’administration pénitentiaire.

Remarque 2. Le nombre d’entrées sous écrou était de 67 308 en 2001,  90 270 en 2007,   88 058 en 2011. Les données de 2012 ne sont pas disponibles.

Source : Ces données sont issues de la statistique trimestrielle de la population sous écrou, direction de l’administration pénitentiaire.

Chr.. T. : “La durée moyenne d’incarcération est passée de 8 à 10 mois en 10 ans”.

Remarque 3. L’indicateur de la durée moyenne de temps passé sous écrou est passé de 8,6 mois en 2001 à 8,4 mois en 2007,  9,8 mois en  2010, comme en 2011. Les données de 2012 ne sont pas disponibles.

Source  : OPALE

L’indicateur de la durée moyenne de détention (ou d’incarcération) est passé de 8,6 mois en 2001  à 11,3 mois en 2011. Les données de 2012 ne sont pas disponibles. Ces indicateurs sont des estimations. Faute de données, nous avons considéré comme négligable le temps passé sous écrou par les condamnés en placement extérieur sans hébergement pénitentiaire. Les données de 2012 ne sont pas disponibles.

Source :  OPALE, ACP, n°306, 21 janvier 2013.


B. - Surpopulation carcérale

 Chr. T. : “Le taux de surpopulation de 100% en centres pénitentiaires, atteint 120 à 200% et jusqu’à 328% en maisons d’arrêt. Pourtant 10 000 places supplémentaires de prison ont été construites dans le même temps.”

Remarque 4.  Dans nombre de centres pénitentiaires, la densité carcérale est supérieure à 100 %. Prenons un exemple parmi d‘autres, celui du centre pénitentiaire de Meaux-Chauconoin.  Au  1er décembre 2012,  il y a 851 détenus pour 638 places opérationnelles, soit un densité de 133 détenus pour 100 places :  593 détenus pour 386 places en quartier “maison d’arrêt” (154 p. 100) ,  185 détenus pour 192 places en quartier “centre de détention” (96 p. 100) et 73 détenus pour 60 places en  quartier pour peine aménagée” (122 p. 100).

Certains établissements pour peine ont, au 1er décembre 2012, des densités supérieures à 100 : des centres de semi-liberté autonomes (Lyon, Meaux-Chauconoin; Corbeil, Gagny)  des  quartiers “centre pour peine aménagée (Les Baumettes, Fresnes-Villejuif) des quartiers “centre de détention” Outre-Mer (Ducos, Faa’a Nuutania, Nouméas). 

Globalement les maisons d’arrêt ont, à cette date,  une densité de 136 détenus pour 100 places. Mais ce taux  n’a pas grand intérêt.  Mieux vaut se réfèrer, on le sait, au nombre de détenus en surnombre : 13 007 au 1er décembre 2012, dont 12 518 en maison d’arrêt ou quartiers “maison d’arrêt. La densité maximale en maison d’arrêt,  au 1er décembre 2012, a été observée  au quartier maison d’arrêt  de Faa’a Nuutania : 315 détenus pour 100 places.

Source : OPALE et statistique mensuelle de la population sous écrou, direction de l’administration pénitentiaire.

Remarque 5.  Au 1er janvier 2000, il y avait 49 294 places opérationnelles. Au 1er janvier 2013 il y en a 56 992, soit 7 698 de plus.

Source : Statistique mensuelle de la population sous écrou, direction de l’administration pénitentiaire.


C. - Courtes peines

Chr. T. : “45% des détenus exécutent une peine de moins de six mois.

Remarque 6.  Au 1er janvier 2012, 10 226 condamnés sous écrou purgent une peine de moins de 6 mois sur un total de 57 501 condamnés,  soit 18 %.

En 2011, sur les 39 688 entrées sous écrou, sur extrait de jugement (délits), on compte 23 980 condamnés à moins de 6 mois, soit  60 %. 

Source : OPALE et statistique trimestrielle de la population sous écrou, direction de l’administration pénitentiaire.

Remarque 7.  En 2010, parmi  les 122 160 peines d’emprisonnement prononcées comportant au moins une partie  ferme (y compris les peines mixtes), on compte 71 223 peines dont le quantum ferme  est de moins de 6 mois, soit  58 %.

Source : Statistique des condamnations prononcées, pour crimes, délits ou contraventions de 5ème classe, inscrites au casier judiciaire, Secrétariat général du Ministère de la Justice, Sous-direction de la Statistique et des Etudes.


D. - Délits routiers

Chr. T. : 42% des sanctions prononcées en correctionnelle portent sur des délits routiers”. 

Remarque 6. On ne connait pas la proportion de condamnés sous écrou, purgeant une peine pour délit routier. Les condamnés sous écrou, purgeant une peine pour “violence involontaire”, au 1er janvier 2012, sont au nombre de 3 259 sur un total de condamnés 57 501 ; ce qui représente 5,7 % des condamnés.

Source : OPALE et statistique trimestrielle de la population sous écrou, direction de l’administration pénitentiaire.

En 2010, parmi les 581 867 condamnations prononcées pour un délit, on compte 240 454 condamnations en matière de circulation routière, soit 41 %. 

En 2010, parmi les 122 160 peines d’emprisonnement prononcées comportant au moins une partie ferme (y compris les peines mixtes) on compte 24 346 condamnations en matière de circulation routière, soit 20 %. 

Source : Statistique des condamnations prononcées, pour crimes, délits ou contraventions de 5ème classe, inscrites au casier judiciaire, Secrétariat général du Ministère de la Justice, Sous-direction de la Statistique et des Etudes.

Pierre V. Tournier